Le Larousse définit l’antiracisme comme ce qui
s’oppose au racisme.
Cette définition s’apparente à un syllogisme quasi
aristotélicien, si A = racisme alors non A = antiracisme.
Raisonnement d’une beauté formelle, hélas c’était
compter sans la perversité du réel où selon les victimes, si non A =
antiracisme, alors A = occident = très méchant.
Antiracisme : mode parodique : Les Animaux
malades de la peste
Le racisme est puant, la rumeur s’en répandit et du
monde entier tous les peuples racisés furent convoqués pour nommer et combattre
ce mal qui répand la terreur. Chacun jura qu’il n’était coupable d’aucun acte
raciste, pas même d’une peccadille, la couleur de sa peau faisant foi de sa
sincérité. Un seul des présents, le blanc occidental, agissant comme l’âne de
Jean de La Fontaine, reconnut bien volontiers qu’il était l’auteur d’une longue
suite d’abominations, mais qu’il avait changé et demandait pardon à tous ceux
qui avaient souffert de son passé sulfureux et même aux mahométans de peau bien
blanche, dont l’un des commandements de la religion de paix leur
interdisant de prendre pour ami, mécréants, chrétiens ou juifs, n’était pas
raciste puisque ordonné par leur livre saint. Il devint vite évident aux yeux
de tous, qu’il ne pouvait y avoir nulle victime, sans que quelque part, un
blanc colonial n’ait activement contribué à son malheur. Sitôt avouée et dûment constatée, la nature
monstrueusement raciste du blanc colonial révulsa jusqu’aux plus timorés et
suscita une immense clameur des peuples assemblés, dont la non-blanchitude
témoignait de la blancheur de leur âme.
Tous s’écrièrent « Quoi, manger l’herbe d’autrui, quel
crime abominable, seule la mort peut expier un tel forfait ». Cependant, vu la
disproportion des forces en présence, les victimes, se reposant sur la
confession du coupable, plutôt que de prendre les armes pour le combattre
jusque dans ses forteresses, jugèrent plus opportun d’édicter que le simple
fait d’être blanc et occidental serait à l’avenir une preuve d’infamie
racialiste et pour garantir enfin une terre lavée de tout racisme, exigèrent
l’abolition des frontières du monde blanc, en vue de procéder à un grand
remplacement. Ce à quoi, noyé dans le chagrin d’une âme irrémédiablement
souillée, jugeant cette vindicte justifiée, le blanc rendit ses frontières
toutes poreuses et, à l’image du corbeau qui ouvrant son large bec laissa
tomber sa proie, offrit sans coup férir aux migrants légaux et illégaux, ses
contrées ancestrales. Les nouveaux arrivants s’érigeant en indigènes de la
République, tout aussitôt investir nombre de bourgades et autres quartiers, et
les proclamèrent territoires interdits au blanc colonial, qui dès lors ne s’y
aventurait plus que furtivement.
Ainsi cher lecteur, ami de la doxa de cette ère
éclairée, du réel oublions l’existence, il suffit en ces temps nouveaux de charger le baudet de tous les maux racistes, pour qu’enfin l’antiracisme
advienne.
Antiracisme : mode discursif :
L’antiracisme est devenu — en occident et seulement en
occident, et ce depuis que la Shoah, s’est imposée à la conscience universelle
comme l’horreur indépassable — plus qu’un positionnement moral, une religion !
Une religion à l’aune de laquelle toutes les idéologies, toutes les politiques
et tous les comportements sociaux et individuels doivent être jugés.
En fait l’antiracisme, subsumant toutes les luttes
morales qui justifiaient auparavant l’existence de toutes les gauches, se pose
aujourd’hui comme méta-doctrine pour penser toutes les formes de
discrimination, apparentées automatiquement à du racisme systémique — depuis la
geste étatique, les échanges internationaux, le sionisme, les pansements
blancs, le maintien des frontières bloquant injustement le libre accès de tous
migrants du monde à l’occident raciste — jusqu’aux comportements personnels. En
effet, tout désir étant l’imitation du désir d’un autre, l’antiracisme, dans un
accès charmant de mimétisme de l’islam, va jusqu’à ordonner le convenable et
condamner le blâmable, jugeant des pulsions et des goûts de chacun ; il est
ainsi malséant et même raciste de déclarer qu’on préfère sortir avec quelqu’un
qui nous ressemble plutôt qu’avec une personne d’ethnie différente,
insupportable de dire qu’on préfère les minces aux gros et déclarer impensable
qu’une victime fétiche du racisme occidental, puisse jamais être coupable d’un
crime quelconque. L’antiracisme opère comme un charme, il suffit que
l’accusation soit lancée publiquement avec force par l’imprécateur, pour que
comme le rappelle l’écrivain Alain Finkielkraut, cela provoque un effet de
sidération de l’esprit. On reste paralysé comme frappé par un sort, une
malédiction.
La religion de l’antiracisme a ses saints. Parmi eux,
les sans-papiers, les immigrés de préférence musulmans, même ceux qui violent
en masse comme à Cologne, car le rappelle Thierry Pech, le directeur général du
think tank Terra Nova, « il faut comprendre ces pauvres gens, ils n’avaient pas
accès au sexe, là d’où ils venaient » bref, sont victimes fétiches, victimes
exemplaires, tous ceux venus d’un ailleurs religieux, culturel ou géographique,
qui s’estiment discriminés, ce qui exclue automatiquement tout blanc occidental
de souche même s’il est un gueux crevant de faim ou de froid, car il ne dispose
alors d’aucune justification raciste pour expliquer son sort. Cela exclut
également tous les Juifs, assassinés par de prétendus hérauts de l’antiracisme,
cela exclut aussi les réfugiés chrétiens d’orient fuyant les massacres, ceux-ci
ne sont pas les bienvenus au sein de la grande tente antiraciste, car ils sont,
blancs, chrétiens et surtout dangereux, parce que dans ces pays, ils furent
témoins et victimes de crimes commis par ceux qui par définition ne peuvent
être racistes (Le racisme n’est pas chez l’Autre, René Galissot[1], puisque le racisme ne
peut surgir que dans la société d’accueil, que ce soit le Québec, la France ou
l’occident en général.
Antiracisme : mode argumentatif :
Les luttes séculaires contre le racisme ont visé
depuis toujours à s’assurer que légalement et concrètement, chacun bénéficie de
l’entièreté des droits, depuis la liberté refusée aux esclaves, jusqu’à
l’élimination de toute forme de discrimination illégale. L’objectif ayant toujours
été d’universaliser les droits et libertés. Or aujourd’hui, ceux qui invoquent
l’antiracisme, ne demandent rien de moins que des droits différents pour des
groupes spécifiques au nom d’un prétendu droit à la différence et d’un droit à
la réparation, qui inclue le droit à l’exclusion des blancs occidentaux, comme
par exemple avec les camps décoloniaux, ou l’interdiction de l’appropriation
culturelle, car ce serait une forme de spoliation d’un groupe dominé. Tous ceux
qui persistent à vouloir l’universalisation des droits sont dès lors accusés
par les « antiracistes » d’être des racistes. Cela va très loin, ainsi la
porte-parole du PIR (Parti des Indigènes de la République), Houria Bouteldja a
sommé les femmes non assimilées à la blanchitude occidentale, si d’aventure
elles étaient violées par l’un des leurs, de ne pas déposer de plainte de façon
à ne pas conforter le groupe dominant, les racistes blancs. Or ne pas déposer
de plainte pour une violence aussi répugnante qu’un viol pour un tel motif, c’est
consacrer une conception raciste de la société, c’est conforter l’idée de
droits séparés et différents selon les affiliations religieuses ou ethniques,
c’est refuser l’idée d’une justice universelle; c’est en fait souscrire à une
société d'apartheid.
Lorsque la lutte antiraciste en arrive à de telles
aberrations, lorsque la notion de droit récuse toute idée d’y accoler un
devoir, lorsque promouvoir des pratiques différentialistes selon que le violeur
est de votre race ou pas, devient quelque chose de pensable, que penser sinon
que l’antiracisme est en fait devenu un racisme à géométrie variable !
[ 1] 1. La synthèse nécessaire : continuité historique et continu social. [Article] « L’Homme et la société : Année 1985 75-76 pp 117-132.
Numéro thématique : synthèse en sciences humaines.