L'éthique de l'insulte, encore

Par: Annie-Ève Collin

Ces derniers jours, le chroniqueur Richard Martineau a protesté, avec raison, parce qu'un triste Cyr a fait une "blague" de TRÈS mauvais goût le ciblant, en même temps que plusieurs autres personnalités publiques. On souhaite à quatorze êtres humains rien de moins que de se mettre en danger en servant de cobayes pour tester un médicament contre la covid-19.


"Mais non, il ne le souhaite pas vraiment, c'est une blague." Il y a des blagues qui ne se font pas! Encore moins publiquement alors qu'on est soi-même une personnalité publique!

Dans un précédent billet dans lequel je parlais aussi de ce que j'appelle l'éthique de l'insulte, je faisais valoir que d'encourager les gens à se suicider, même si on n'est "pas sérieux" en le disant ou en l'écrivant, dépasse les limites. C'est la même chose pour le fait de souhaiter la maladie ou la mort à des gens.

Bon nombre de détracteurs de Richard Martineau ont justifié le comportement du triste Cyr en invoquant que Martineau écrit des chroniques de mauvais goût à l'année longue et qu'il est donc justifié qu'il se fasse rendre la pareille.

Peu importe ce qu'on pense des opinions de Richard Martineau, il n'a jamais utilisé ses chroniques pour souhaiter la maladie ou la mort à des gens. Il est tout à fait légitime de sa part de réagir quand on lui souhaite ce genre de chose - même si on ajoute que "c'est une blague".

Par ailleurs, je reviens sur un autre point que j'ai défendu dans mon précédent billet sur ce que j'appelle l'éthique de l'insulte : selon le rôle que l'on joue, des limites plus strictes peuvent s'appliquer. Il est à noter que Richard Martineau ne réagit pas simplement à la "blague". Il a en fait réagi davantage au fait qu'une députée ait publiquement ri de cette blague. 

Le rôle de députée fait en sorte qu'on a des responsabilités particulières. En ce qui me concerne, rire de l'idée que quelqu'un soit malade ou risque la mort dépasse les limites, point, mais c'est encore pire quand une personne censée représenter les citoyens le fait publiquement.

Je conclurai avec un commentaire qui n'a rien d'original, beaucoup de gens l'ont déjà fait depuis que Richard Martineau a dénoncé la situation sur sa page Facebook. Ce commentaire n'en est pas moins vrai : parmi les gens qui ont ri de cette "blague", on pourrait parier que si la même blague avait été faite aux dépens de Dalila Awada, de Judith Lussier, de Xavier Camus, bref de gens à leurs yeux respectables, ils auraient hurlé au scandale. 

Ce qui permet d'affirmer cela? Quand on se moque de Dalila Awada, ils hurlent au scandale (sans oublier au racisme et au sexisme) pour bien moins que ça. Je choisis Awada comme exemple, mais ça pourrait être d'autres personnalités qui défendent le même type de positions sociales et politiques.

Quand on leur signale comme il est flagrant qu'ils ont deux poids deux mesures, ils patinent bien pour dire que ce n'est pas la même chose. Mais C'EST la même chose.



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