Requiem pour l'homme normal

Par: Léon Ouaknine

Requiem pour une espèce en voie de disparition …

 

Ce fut une étrange épidémie, d’abord presque invisible, quelques intellectuels ici et là, surtout ceux qui ne supportaient pas qu’on puisse douter de la nécessité de tout déconstruire, puis comme un feu qui couve, des brûlots surgirent, principalement chez les pleureuses, surtout celles qu’il est interdit de nommer.

On ne se rendit compte des vastes effets de cette épidémie qu’il convient aujourd’hui de qualifier de brillante révolution que longtemps après, suite aux travaux de l’école intersectionnelle des historiens de l’université de Paris qui démontra par la rigueur de sa méthodologie, que oui, l’homme intermodal n’avait pas toujours été ce qu’il est aujourd’hui et que la grande transformation l’avait libéré des chaines systémiques qui l’opprimaient.

Tout semble-t-il débuta dans les milieux universitaires américains de la côte ouest, lorsque presque invisiblement, les organes externes de ceux qu’on appelle maintenant les intermodaux (Homo intermodalus), s’allongea peut-être d’un millimètre tous les 3 mois, pour certains ce fut le nez pour former ce qui deviendra quelques années plus tard l’appendice nasal ressemblant à la trompe du Nasalis larvatus; ce splendide organe permettait de renifler à 10 km à la ronde l’odeur pestilentielle de ceux qui refusaient  le racialisme au motif saugrenu qu’une loi uniforme devait régir l’ensemble des citoyens, sans tenir compte de leur ressenti; pour d’autres ce furent les oreilles qui prirent une forme éléphantine, permettant à cette catégorie de l’homo intermodal de s’éventer vigoureusement lorsque des relents nauséabonds d’idées pré-décoloniale les assaillaient, pour certains, ce furent les yeux qui finalement se libérèrent de l’enclos restrictif du visage pour saillir au bout de pédoncules très flexibles qui permirent à cette branche  de l’homo intermodalus de voir dans toutes les directions et de pouvoir ainsi se préserver de toute rencontre inopportune sans devoir tourner la tête, enfin pour une petite élite, l’homo intermodalus totalus, gratifié de l’ensemble des changements, elle assuma la charge de guider la nouvelle humanité en invoquant le petit livre vert, trésor de vérité, qui ordonne le convenable et interdit le blâmable.

Bien sûr il resta ce reliquat d’homo sapiens qui négligés par la nature, refusèrent obstinément de comprendre que quelque chose en eux ne tournait pas rond, et que le rejet dont ils étaient l’objet de la part de l’homo intermodalus était naturel et que tout ce qui avait été conçu par les déshérités de l’évolution, devait être rejeté sans hésitation car porteur de ce que la société avait de mauvais avant la grande transformation. 



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