Nier l'identité de genre, c'est comme nier l'âme

Par: Annie-Ève Collin

En réponse à une lettre parue dans la Presse, voici ce que je dirai : nier l'existence de l'identité de genre, c'est comme nier l'existence de l'âme, c'est-à-dire que c'est un droit fondamental dans toute société libre. Le concept d'identité de genre se compare au concept de l'âme dans la mesure où il s'agirait de quelque chose d'immatériel qui constitue le substrat de l'identité réelle de l'individu, de son "moi authentique" (l'idée d'un moi authentique étant déjà une croyance métaphysique qui ne résiste guère à la réflexion rationnelle et réaliste).


Les signataires de la lettre taxent les femmes de Pour les droits des femmes du Québec (PDF Québec) d'intolérance, de discrimination, de violence, de transphobie, parce qu'elles usent de ce droit fondamental de ne pas endosser les croyances métaphysiques des autres, et font ce que toute féministe cohérente ferait : rappeler l'importance de l'égalité des SEXES, qui implique qu'on continue de tenir compte de l'existence du sexe.

À l'instar de tous ceux qui s'opposent aux féministes critiques du genre, les signataires de la lettre parue dans la Presse n'apportent aucun argument prouvant qu'un humain de sexe mâle peut être une femme, elles se contentent d'affirmer que les trans de sexe mâle (les personnes qu'elles désignent avec l'expression "femmes trans") sont des femmes.

De façon tout aussi typique, elles font valoir que :

1. les personnes trans sont sujettes au suicide ;
2. les personnes trans risquent d'être victimes de harcèlement ;
3. les personnes trans risquent d'être victimes de violence.

Ces trois prémisses sont sans aucun doute vraies. Cependant, j'attends encore qu'on me montre le lien qu'elles ont avec les conclusions suivantes :
- l'identité de genre existe ;
- un mâle humain peut être une femme.

Par ailleurs, il importe de rectifier ceci : "Les femmes trans font face aux mêmes discriminations que nous toutes par rapport à leur genre féminin [...]" Le sexisme que subissent les femmes n'est pas en fonction de leur genre, mais bien en fonction de leur SEXE. Une femme masculine - et notez qu'une femme, c'est une femelle humaine - n'est pas à l'abri du sexisme du fait d'avoir un genre masculin ! Au contraire, ça peut servir de prétexte pour s'en prendre à elle : elle risque les moqueries à cause de ça, et même d'avoir affaire à des hommes qui veulent "lui montrer ce que c'est un homme", si vous voyez ce que je veux dire...

Finalement, il ne faut surtout pas laisser passer le sophisme sur le droit à disposer de son corps que l'on retrouve dans cette lettre qui n'est que de la basse rhétorique : avoir le droit de disposer de son corps, ça ne veut pas dire qu'on peut imposer aux autres de confirmer qu'on est quelque chose alors qu'on ne l'est pas. Un trans de sexe mâle a le droit de faire ce qu'il veut avec son corps, il peut se faire opérer les parties génitales ou pas, passer par l'hormonothérapie ou pas, se faire poser des implants mammaires ou pas, il peut faire tout ce qu'il veut avec son corps tant que ça n'implique des changements que pour lui seul. 

Mais obliger les autres à éviter de parler de la différence entre un trans de sexe mâle et une femme, ce n'est pas inclus dans le droit à disposer de son corps, pour la bonne raison qu'il ne s'agit pas d'une action sur le corps de quelqu'un mais d'un acte d'expression.